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Hong Kong & Shanghai Tours
30 novembre 2018

Mémoires russes de Hong Kong

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84C07340-0824-4DEC-8486-3CC62BB09146Lorsque l’on parle avec des personnes présentes à Hong Kong dans les années 60 et 70, on est frappé par la référence fréquente aux restaurants d’origine russe. Il fut un temps, en effet, où la nourriture occidentale était à Hong Kong était systématiquement associée à ce type de cuisine. De même, les pâtisseries russes étaient connues dans la colonie pour leurs énormes gâteaux à la crème et aux fruits. Qui sont donc ces russes installés à Hong Kong dont l'héritage est plus palpable qu'on ne le croit habituellement? 

AED9DA85-EF5C-433F-B1A7-879C5DF32F62En visitant le cimetière colonial de Happy Valley, où se trouvent les tombes les plus anciennes, on trouve au milieu des noms anglais des pierres tombales avec croix de Saint-Cyrille portant des patronymes slaves. Parmi les raisons qui ont conduit plusieurs générations de russes à émigrer à Hong Kong, beaucoup sont liées à l’histoire turbulante de ce pays. Les premières vagues sont les juifs fuyant les progroms des années 1880 qui se réfugient en majorité à Harbin, en Manchourie, au bout de la ligne du Transsibérien. Certaines familles continuent ensuite le voyage jusqu'à Shanghai et Hong Kong. Au cimetière juif qui date de 1855, on trouve par exemple la tombe de Pearl Antschel Steinberg, née en Russie et décédée à Hong Kong a l’âge de 72 ans en 1901. Après la révolution de 1917, c’est la fuite massive des partisans du Tsar devant les Bolcheviks qui pousse des dizaines de milliers de russes vers la Chine.

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Ces Russes Blancs quitteront Harbin pour Shanghai dans les années 1920, transformant certains quartiers en “petite Russie” et à partir des années 1930 Hong Kong, alors "annexe" économique du “Paris de l’Orient”. Enfin, les cartes seront rebattues à nouveau en 1949 lors de la chute de Chiang Kai Shek face aux armées de Mao. Les Russes doivent, à l’instar de nombreux étrangers, quitter la Chine et transitent pour beaucoup par Hong Kong avant d'obtenir un visa pour l'Australie ou les États Unis. Certains choisissent néanmoins de s’installer dans le port des parfums. 

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En 1934 est créé l’église orthodoxe Pierre et Paul sous le patronage du missionnaire et futur archevêque Dmitry Uspensky (1886-1970) originaire de Shuya près de Moscou. Parallèlement, les anciens soldats du tsar démobilisés, souvent des combattants expérimentés, prêtent main forte à la police de Hong Kong dont ils constituent jusqu'à 15% des effectifs à cette période. Un petit groupe forme même une unité spécialisée dans la lutte contre les pirates qui sévissent alors en mer de Chine, affectant le traffic de marchandises et menaçant la sécurité des Européens. En effet, une prise d’otages sur un bateau de ligne près de Hong Kong fait grand bruit dans les journaux de l'époque et ces ressources supplémentaires russes sont fort appréciées. Ils accompagneront à partir de 1930 les cargaisons de valeur, dissuadant les attaques de pirates qui diminuent alors significativement pour les bateaux protégés par ces gardes (première photo).

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Déjà populaire à Harbin et Shanghai, la cuisine russe ne tarde pas à garnir les tables des restaurants de Hong Kong. Ainsi en 1928, l’associé juif russe Aaron Landau de Jimmy James, le créateur de Jimmy’s Kitchen à Shanghai rue de Nankin, installe la marque à Hong Kong. Parmi les plats de la carte, on trouve des classiques comme le poulet "à la king", la truite meunière ou le fameux bortsch. Le succès est tel que, tout comme à Shanghai, les cafés de Hong Kong, dont les patrons ont souvent été formés par les russes, reprennent ces plats.

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Aujourd’hui encore, que ce soit au Deda Cafe de Shanghai ou au Queen’s Café de Hong Kong, on trouve aux côtés du café moulu à l’ancienne la "lo sung tong" (羅宋湯), nom chinois du borstsch, ou l’escalope panée. Tkachenko, qui était déjà présent à Shanghai, ouvre dans les années 1950 un salon de thé dont les gâteaux sont réputés. Dans le livre "Gweilo", les mémoires d'enfance de Martin Booth, c’est en sortant de chez Tkachenko que le personnage central fait la connaissance de "la reine de Kowloon", une aristocrate russe déchue et opiomane qui brade ses diamants dans la rue pour survivre. Sur Nathan Road, le restaurant Chantecler, dont seul le nom est français, proposait également à cette époque une cuisine fine faite de zakouski, les entrées typiques russes, et de foie poêlé au bacon. Enfin, encore en activité aujourd'hui, la patisserie Cherikoff, proche de Waterloo Road sur Kowloon, fait partie des adresses de tradition russe.

Si vous avez l’occasion de déjeuner à Hong Kong, regardez si la carte ne comporte pas de bortsch. Vous aurez ainsi l’occasion de célébrer le temps d’un repas 150 d’histoire de la Russie en Chine. Bon appétit!

Références et adresses:

  • Anti-Piracy Guards - 1939-1939 par Nona Parks, post du site familial Pio-Ulski.com 
  • Othodoxy in Hong Kong, post sur le site Peter & Paul Orthodox Church in Hong Kong
  • Russian food and eateries in Hong Kong, site Gwulo de David Bellis, post 3/2/2011
  • Jimmy's Kitchen, 1-3  Wyndham Street, Central, Hong Kong, tel +852 2526 5293
  • Cherikoff, 760 Nathan Road, Prince Edward, Hong Kong, tel +852 2381 8195
  • Queen's Cafe, 500 King's Road, North Point, Hong Kong, tel +852 2576 2658
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